Le vendredi 28 mars 2025, L’Autonome 28 est intervenue dans le cadre de l’Assemblée Générale des DDEN d’Eure et Loir à Lucé (28). Cette intervention portait sur la question des relations entre l’Ecole et les Familles. Nous reproduisons ci-dessous la version écrite de l’Intervention de François Cauchon, Vice-Président de notre association. |
Les Délégués Départementaux de l'Éducation Nationale jouent un rôle crucial dans le système éducatif en tant que facilitateurs, médiateurs et acteurs de l'amélioration continue des établissements scolaires. Leur engagement contribue à renforcer le lien entre l'école et la communauté, à promouvoir l'éducation de qualité et à soutenir les élèves et leurs familles dans leur parcours éducatif. Pour plus de précisions, cliquez : Chronique DDEN |
Les relations école/familles : François Cauchon, Vice-Président de l’Autonome 28
Mesdames, Messieurs, bonjour.
Permettez-moi, d’abord, de vous remercier pour votre invitation, et de vous rappeler que j’étais déjà venu vous rencontrer sur ce thème en octobre 2021. J’avais, alors, insisté sur le pluriel du mot familles en vous donnant lecture de deux demandes de familles concernant le travail à la maison. Demandes totalement contradictoires (une famille dénonçant le travail du soir alors que l’autre le trouvait insuffisant) illustrant les difficultés rencontrées par les enseignants
On avait aussi vu que l’institution se préoccupait de la qualité de cette relation et que beaucoup de choses avaient été mises en place, sensées l’améliorer.
Quelques exemples :
Ces garanties sont assurées par la mise en place d’un certain nombre de dispositifs parmi lesquels :
Comment l’expliquer ?
On voit, dans les exemples ci-dessus, qu’on est beaucoup dans la transmission d’informations.
Or si cela fonctionne parfaitement pour certaines familles, cela l’est beaucoup moins pour d’autres.
L’école a son langage spécifique qui n’est pas partagé par tous.
Quelques exemples :
A l’école on parle de :
IEN, DASEN, ULIS, SEGPA, GEVASCO.
Et ceci a pour conséquence de renforcer la distance entre certains parents et l’école perçue comme un univers éloigné du leur.
Pour remédier à ces difficultés, la loi du 08/07/2013 renforce la loi de 2002 sur la coéducation en proposant un certain nombre de dispositifs tels que :
Là encore, force est de constater le fossé entre l’intention et la mise en œuvre.
Interrogeons-nous sur les effets de toutes ces démarches effectives ou non ?
Nous disposons de 2 indicateurs :
2024 : participation 54,84%, 2023 : 53,48%
Répartition des sièges.
Parents non constitués en associations : 64,89%, 2023, 65,05%
Associations locales non affiliées : 17,39%, 2023, 17%
Soit plus de 82%
Pour les fédérations : FCPE 9,79%, 2023, 9,72%
Listes d’unions 4,73%, 2023, 4,99%
PEEP 1,75%, 2023, 1,70%
UNAAPE 1,52%, 2023, 1,55% (listes autonomes)
On remarque que l’écrasante majorité tant pour constituer les listes que pour voter, choisit la proximité aussi bien pour les personnes que pour les projets. Les listes locales s’engageront pour s’opposer à la fermeture d’une classe dans leur école, mais beaucoup moins sur la réduction des moyens décidés par le ministère au niveau national.
Concernant les fédérations, on note ponctuellement des adhésions de parents non pas pour s’engager sur le projet de l’association mais pour régler un problème individuel.
Et certains de ces parents se retrouvent élus avec quelques fois des conséquences négatives.
Ce qui m’amène au second point : Le climat scolaire.
Suite à ce qui été dit auparavant, on constate d’abord un certain nombre de changements dans les conseils d’école.
On nous signale des cas où les RPE demandent des comptes en dehors des règles régissant le fonctionnement : Ex : justifier l’intérêt d’un projet, contester une sortie.
Souvent ces interventions intempestives amènent à des fractures entres RPE. Ce qui complique le travail des directeurs.
En dehors des Conseils d’écoles, nous avons toujours des remontées concernant des comportements tels que l’intrusion d’un père pendant les heures de cours, une mère qui enregistre un échange avec des enseignants, les pressions liées aux conflits familiaux.
Mais avec une différence par rapport au passé. Ces conflits se retrouvent maintenant sur les réseaux sociaux et ce qui était circonscrit à quelques individus devient un phénomène de groupe voir de meute dans les cas les plus graves, où chacun y va de son commentaire sans la moindre retenue.
Là encore, cela divise les parents d’élèves et en rajoute au ressenti des enseignants mis en cause sur la place publique.
D’autant que les personnels se trouvent face à une autre difficulté. De quels recours disposent-ils ?
D’abord tous les commentaires sont-ils illégitimes ?
Il faut savoir distinguer le droit à la critique des accusations mensongères et de la diffamation. La maîtresse donne trop de devoirs, c’est une critique, la maîtresse est raciste c’est une diffamation en l’absence de preuves.
Suivant les cas les réponses à apporter ne sont pas de même nature.
Dans le premier cas, les textes préconisent de rencontrer les parents. Mais ce qu’ils ne disent pas c’est que cette rencontre se prépare.
Recherche d’infos sur les textes officiels.
Savoir écouter les difficultés des parents pour gérer les devoirs par exemple.
Rappeler que le mieux c’est de venir parler à l’école des difficultés rencontrées.
Dans le deuxième cas, il faut alerter l’IEN et, si on en a une, sa protection juridique. Est-ce une récidive ? Quelles relations habituelles avec cette famille ? Récupérer des captures d’écran.
Faut-il rencontrer ou pas la famille ? Etudier les suites judiciaires.
Autre différence.
Depuis la crise sanitaire se sont développés des discours mettant en cause les institutions et leurs agents. Aussi bien les soignants, que les magistrats, que les enseignants et les personnels de service.
Souvenez-vous :
Remise en cause de l’organisation de l’accueil pendant le confinement, menaces quant à l’obligation de porter le masque, dénonciation dans les médias de la mise en place de récréations séparées…
Le tout s’appuyant non sur des informations fiables mais des opinions et le « on dit » des réseaux.
Cela a créé un climat basé sur la perte de confiance et la remise en cause des professionnels. Comme par exemple, ce papa qui refuse des APC pour sa fille car il se considère seul capable de juger des résultats scolaires de son enfant.
C’est cette confiance dégradée et partagée qui gagne maintenant une place importante dans les relations entre l’école et les familles.
ET POURTANT
Malgré tous ces constats, nous notons sur les 3 dernières années que le nombre de dossiers destinés à une action en justice reste stable.
Par contre, les appels, les signalements, les demandes d’aide augmentent.
Nous sommes passés d’une activité de protection juridique à une activité de conseils et d’accompagnement.
Si cela s’est d’abord fait de façon ponctuelle, cela se renforce au fur et à mesure que le temps passe.
Nous pouvons en tirer un certain nombre d’enseignements :
Les rencontres avec les familles sont primordiales surtout en dehors des temps de crise.
Ces échanges doivent permettre, dans un certains cas, de recentrer le débat. Alors que certains parents sont centrés sur les comportements, il faut les amener à parler des apprentissages.
Comment ?
Voici, à titre d’exemples, trois supports permettant de construire un lien positif avec les familles :
Nous aidons les adhérents qui nous appellent sur ces principes, que ce soit pour les équipes éducatives, les réunions institutionnelles ou les rencontres en temps de crise.
Nous en constatons les effets positifs même si nous devons encore prendre du recul.
Pour résumer, je reprendrai la parole d’un ancien ministre : Ce que vous proposez c’est une approche par le cœur du métier.
Mais cela demande de la formation et de l’information à destination de toutes les personnes impliquées dans le fonctionnement de l’école publique.
Que ce soit les DDEN ou l’Autonome, nous y avons, chacun à notre place, un rôle à jouer.
Mesdames, Messieurs, bonjour.
Permettez-moi, d’abord, de vous remercier pour votre invitation, et de vous rappeler que j’étais déjà venu vous rencontrer sur ce thème en octobre 2021. J’avais, alors, insisté sur le pluriel du mot familles en vous donnant lecture de deux demandes de familles concernant le travail à la maison. Demandes totalement contradictoires (une famille dénonçant le travail du soir alors que l’autre le trouvait insuffisant) illustrant les difficultés rencontrées par les enseignants
On avait aussi vu que l’institution se préoccupait de la qualité de cette relation et que beaucoup de choses avaient été mises en place, sensées l’améliorer.
Quelques exemples :
- Loi de 1975 créant les conseils d’école, renforcée par la loi de 1989.
- Circulaires de 2001, 2002 donnant une dimension professionnelle à cette relation.
- Circulaire de 2002 sur la coéducation suivie d’une vague d’autres circulaires 2007, 2009, 2010, 2012.
Ces garanties sont assurées par la mise en place d’un certain nombre de dispositifs parmi lesquels :
- Les conseils d’école
- Les documents de liaisons (dernier en date le LSU)
- Les réunions d’informations obligatoires
- Les remises des résultats des évaluations nationales
Comment l’expliquer ?
On voit, dans les exemples ci-dessus, qu’on est beaucoup dans la transmission d’informations.
Or si cela fonctionne parfaitement pour certaines familles, cela l’est beaucoup moins pour d’autres.
L’école a son langage spécifique qui n’est pas partagé par tous.
Quelques exemples :
A l’école on parle de :
- Savoirs fondamentaux.
- Socle commun.
- Référentiel de compétences.
- Maîtrise de la langue.
IEN, DASEN, ULIS, SEGPA, GEVASCO.
Et ceci a pour conséquence de renforcer la distance entre certains parents et l’école perçue comme un univers éloigné du leur.
Pour remédier à ces difficultés, la loi du 08/07/2013 renforce la loi de 2002 sur la coéducation en proposant un certain nombre de dispositifs tels que :
- La mallette des parents. Qui la connaît ?
- La création d’un espace à l’usage des parents et de leurs délégués dans chaque établissement. Qu’en est-il dans la réalité ?
Là encore, force est de constater le fossé entre l’intention et la mise en œuvre.
Interrogeons-nous sur les effets de toutes ces démarches effectives ou non ?
Nous disposons de 2 indicateurs :
- Les résultats aux élections des conseils d’école.
- Le baromètre du climat scolaire.
2024 : participation 54,84%, 2023 : 53,48%
Répartition des sièges.
Parents non constitués en associations : 64,89%, 2023, 65,05%
Associations locales non affiliées : 17,39%, 2023, 17%
Soit plus de 82%
Pour les fédérations : FCPE 9,79%, 2023, 9,72%
Listes d’unions 4,73%, 2023, 4,99%
PEEP 1,75%, 2023, 1,70%
UNAAPE 1,52%, 2023, 1,55% (listes autonomes)
On remarque que l’écrasante majorité tant pour constituer les listes que pour voter, choisit la proximité aussi bien pour les personnes que pour les projets. Les listes locales s’engageront pour s’opposer à la fermeture d’une classe dans leur école, mais beaucoup moins sur la réduction des moyens décidés par le ministère au niveau national.
Concernant les fédérations, on note ponctuellement des adhésions de parents non pas pour s’engager sur le projet de l’association mais pour régler un problème individuel.
Et certains de ces parents se retrouvent élus avec quelques fois des conséquences négatives.
Ce qui m’amène au second point : Le climat scolaire.
Suite à ce qui été dit auparavant, on constate d’abord un certain nombre de changements dans les conseils d’école.
On nous signale des cas où les RPE demandent des comptes en dehors des règles régissant le fonctionnement : Ex : justifier l’intérêt d’un projet, contester une sortie.
Souvent ces interventions intempestives amènent à des fractures entres RPE. Ce qui complique le travail des directeurs.
En dehors des Conseils d’écoles, nous avons toujours des remontées concernant des comportements tels que l’intrusion d’un père pendant les heures de cours, une mère qui enregistre un échange avec des enseignants, les pressions liées aux conflits familiaux.
Mais avec une différence par rapport au passé. Ces conflits se retrouvent maintenant sur les réseaux sociaux et ce qui était circonscrit à quelques individus devient un phénomène de groupe voir de meute dans les cas les plus graves, où chacun y va de son commentaire sans la moindre retenue.
Là encore, cela divise les parents d’élèves et en rajoute au ressenti des enseignants mis en cause sur la place publique.
D’autant que les personnels se trouvent face à une autre difficulté. De quels recours disposent-ils ?
D’abord tous les commentaires sont-ils illégitimes ?
Il faut savoir distinguer le droit à la critique des accusations mensongères et de la diffamation. La maîtresse donne trop de devoirs, c’est une critique, la maîtresse est raciste c’est une diffamation en l’absence de preuves.
Suivant les cas les réponses à apporter ne sont pas de même nature.
Dans le premier cas, les textes préconisent de rencontrer les parents. Mais ce qu’ils ne disent pas c’est que cette rencontre se prépare.
Recherche d’infos sur les textes officiels.
Savoir écouter les difficultés des parents pour gérer les devoirs par exemple.
Rappeler que le mieux c’est de venir parler à l’école des difficultés rencontrées.
Dans le deuxième cas, il faut alerter l’IEN et, si on en a une, sa protection juridique. Est-ce une récidive ? Quelles relations habituelles avec cette famille ? Récupérer des captures d’écran.
Faut-il rencontrer ou pas la famille ? Etudier les suites judiciaires.
Autre différence.
Depuis la crise sanitaire se sont développés des discours mettant en cause les institutions et leurs agents. Aussi bien les soignants, que les magistrats, que les enseignants et les personnels de service.
Souvenez-vous :
Remise en cause de l’organisation de l’accueil pendant le confinement, menaces quant à l’obligation de porter le masque, dénonciation dans les médias de la mise en place de récréations séparées…
Le tout s’appuyant non sur des informations fiables mais des opinions et le « on dit » des réseaux.
Cela a créé un climat basé sur la perte de confiance et la remise en cause des professionnels. Comme par exemple, ce papa qui refuse des APC pour sa fille car il se considère seul capable de juger des résultats scolaires de son enfant.
C’est cette confiance dégradée et partagée qui gagne maintenant une place importante dans les relations entre l’école et les familles.
ET POURTANT
Malgré tous ces constats, nous notons sur les 3 dernières années que le nombre de dossiers destinés à une action en justice reste stable.
Par contre, les appels, les signalements, les demandes d’aide augmentent.
Nous sommes passés d’une activité de protection juridique à une activité de conseils et d’accompagnement.
Si cela s’est d’abord fait de façon ponctuelle, cela se renforce au fur et à mesure que le temps passe.
Nous pouvons en tirer un certain nombre d’enseignements :
Les rencontres avec les familles sont primordiales surtout en dehors des temps de crise.
Ces échanges doivent permettre, dans un certains cas, de recentrer le débat. Alors que certains parents sont centrés sur les comportements, il faut les amener à parler des apprentissages.
Comment ?
Voici, à titre d’exemples, trois supports permettant de construire un lien positif avec les familles :
- Les cahiers et autres supports écrits jouent un rôle majeur. La qualité d’écriture, le soin, les remarques des enseignants sont le premier élément de communication.
- Le repérage et la valorisation des progrès réels.
- Les échanges sur ce qui permet de progresser, à l’école, à la maison.
Nous aidons les adhérents qui nous appellent sur ces principes, que ce soit pour les équipes éducatives, les réunions institutionnelles ou les rencontres en temps de crise.
Nous en constatons les effets positifs même si nous devons encore prendre du recul.
Pour résumer, je reprendrai la parole d’un ancien ministre : Ce que vous proposez c’est une approche par le cœur du métier.
Mais cela demande de la formation et de l’information à destination de toutes les personnes impliquées dans le fonctionnement de l’école publique.
Que ce soit les DDEN ou l’Autonome, nous y avons, chacun à notre place, un rôle à jouer.